Montréal n’est pas la seule municipalité à avoir utilisé le fleuve Saint-Laurent comme dépotoir pour ses déchets. Il existe de vieux dépotoirs tout le long du fleuve. L’un de mes lecteurs faisait le commentaire suivant sur mon site. « J’ai passé mon enfance entre Varennes et Verchères à l’époque… il n’y avait pas de cueillette des ordures en campagne. C’était le fleuve. »
Dans mon blogue « Jus de vidanges », je vous faisais part des problèmes causés par le dépotoir de Pointe-Saint-Charles qui laisse échapper des biogaz et des jus de vidanges dans le fleuve. Les dépotoirs situés le long du fleuve ne sont pas différents, mais dans le cas de ces derniers s’ajoute l’érosion des berges qui laisse échapper inéluctablement des déchets, qui flottent vers certains des plus beaux sites du fleuve Saint-Laurent. Je vous donne deux exemples.
Les citoyens de Rivière-Saint-Jean, une municipalité de la Minganie sur la Côte-Nord, sont aux prises avec un dépotoir qui a été utilisé durant des décennies. À cet endroit, l’érosion des berges déterre les déchets qui sont emportés par les eaux du fleuve. Le dépotoir se trouve à quelques kilomètres du parc national de l’Archipel-de-Mingan.
Dans un article sur ce dépotoir publié dans le Devoir, le 27 juin 2017, le journaliste Alexandre Shields écrit ; « Le gouvernement du Québec est au fait de ce déversement continu de déchets depuis le mois d’août 2015. » Selon le même article, après une demande d’aide financière de la municipalité, le ministère de l’Environnement a d’abord statué que la municipalité était responsable de la gestion de ce site d’enfouissement. J’aimerais bien connaître le nom du brillant fonctionnaire qui s’est débarrassé du dossier avec un tel énoncé.
Heureusement, quelqu’un au ministère a réalisé la stupidité de l’énoncé qui demandait à une municipalité de 220 habitants la responsabilité de régler un tel problème. La bureaucratie a ensuite fait ce que les fonctionnaires font très bien ; elle a transféré le dossier au Ministère de l’Énergie et des Ressources naturelles. Durant trois ans, les fonctionnaires ont étudié la situation pendant que les déchets flottaient toujours allègrement à l’embouchure de la rivière Saint-Jean et vers l’Archipel-de-Mingan. Le gouvernement Couillard a désigné cette rivière à saumon comme un lieu historique et, comme par hasard, les travaux de nettoyage ont débuté.
Étrange, comment le nettoyage d’un dépotoir correspond à une annonce gouvernementale. L’Île d’Anticosti est un autre exemple ; elle devrait bientôt être désignée comme « aire protégée d’utilisation durable. » Or, là aussi il y a un ancien dépotoir qui se déverse dans le Saint-Laurent. L’Île est candidate pour une reconnaissance au patrimoine mondial de l’UNESCO. Le gouvernement attend donc de la visite et comme nous le faisons chez nous lorsque la visite se pointe, on fait le ménage. Selon un courriel reçu par Le Devoir. « Des travaux de nettoyage temporaires ont été réalisés au mois d’août 2019. Ces travaux ont permis de collecter 1500 litres de verre brisé, 500 litres de matières résiduelles et 4 tonnes de métal. »
Il semble donc que les dépotoirs sont nettoyés seulement dans des cas exceptionnels comme si la pollution de notre majestueux fleuve Saint-Laurent ne serait pas une excuse suffisante. Mais, la bureaucratie travaille souvent avec sa propre logique. Je ne serais pas surpris de voir, un jour, un fonctionnaire tenté de nous convaincre que ces dépotoirs font partie de notre patrimoine national et qu’il faut les préserver pour permettre aux archéologues dans cent ans d’effectuer des fouilles pour comprendre comment nous vivions à notre époque.
Très bon article sur les effets des dépotoirs le long du St-Laurent sur la propreté et la qualité de l’eau de notre fleuve.
Un peu d’humour mordant dans le paragraphe suivant sur notre patrimoine national peut faire sourire et réfléchir. Une image différente de notre époque de l’anthropocène.
Très intéressant!
» Je ne serais pas surpris de voir, un jour, un fonctionnaire tenté de nous convaincre que ces dépotoirs font partie de notre patrimoine national et qu’il faut les préserver pour permettre aux archéologues dans cent ans d’effectuer des fouilles pour comprendre comment nous vivions à notre époque. »
Merci pour le commentaire Réal. Au plaisir de se revoir.
Bonjour mon grand-frère,
Tu as raison de dire que la bureaucratie ralentit souvent la mise en place de projets essentiels mais il n’y a pas que le fonctionnaire « inefficace », souvent pas par sa faute, qui est à la source du problème. Bien plus que le fonctionnaire, il y des orientations gouvernementales qui, en matière d’environnement, sont tellement vagues qu’elles laissent à ses supérieurs (allant jusqu’au politique) la responsabilité de juger de la pertinence d’agir. Et, dans les hautes sphères de l’état, cette responsabilité en matière d’environnement est subordonnée à toutes sortes d’autres préoccupations poussées par les ministères à vocation économique. On le voit quotidiennement dans les médias. Cela inclut le sous-financement chronique du ministère l’Environnement qui limite sa capacité de déployer les effectifs nécessaires pour corriger les situations inacceptables que tu décries.
Ma chère sœur. J’ai bien lu ton commentaire et je suis d’accord avec toi. Ton professeur d’université t’aurait aussi donné un A+ et tes confrères et consœurs environnementalistes sont sûrement d’accord avec toi. Mais dans notre société démocratique il ne suffit pas d’avoir raison il faut aussi convaincre monsieur Tout-le-Monde. C’est lui qui vote et c’est lui qui est majoritaire.
Dominic Champagne avec son Pacte pour la transition parlait au-dessus de la tête de monsieur Tout-le-Monde. Il a ramassé 284 000 signatures alors que nous sommes 8 485 000 au Québec. Un parti politique dirigé par des intellectuelles et scientifique feraient la promotion d’un complexe et détaillé programme, mais, dans le monde aujourd’hui, il ne se ferait pas élire. C’est comme ça que nous nous retrouvons avec les Donald Trump, Boris Johnson et Jail Bolsonaro.
Il y a probablement des milliers d‘anciens dépotoirs qui vont continuer a polluer leur environnement sans que personne en fasse de cas car ils ne sont pas a proximité d‘un cours d‘eau.
Un gros ménage s’impose.