Crise invisible

L’automne dernier, la Fondation Rivières publiait son palmarès 2022 des déversements d’eaux usées dans les lacs et rivières du Québec. Durant l’année, il y a eu plus de 57,263 déversements. Pour ceux qui lisent mes blogues, vous savez que ces déversements me révoltent d’autant plus que nos lacs et rivières représentent notre principale source d’eau potable. Parmi les dix grandes villes qui dominent le palmarès, Longueuil vient en tête, suivie de Trois-Rivières(3), Laval (4), Québec (6) et Montréal (7). Toutes déversent, à certains moments, des eaux usées dans le fleuve Saint-Laurent. Cette situation ne peut qu’empirer face aux changements climatiques qui sont susceptibles de nous envoyer des pluies diluviennes. Or nos infrastructures ne sont pas en mesure d’absorber ces pluies.

Nous ne sommes pas les seuls. 80 % des eaux usées dans le monde sont déversées sans être traitées. La Banque mondiale s’inquiète de la pollution élevée de l’eau partout dans le monde. Elle a baptisé cette situation comme une « crise invisible ». Tant les pays riches que les pays pauvres subissent de hauts niveaux de pollution, mais il y a une importante différence. Dans les pays riches (comme le Canada), les polluants retrouvés dans les eaux sont beaucoup plus variés. Aux États-Unis, des centaines de nouveaux produits chimiques sont déversés dans l’eau chaque année. J’ai de la difficulté à croire que les usines de traitement ont la capacité d’adapter leur mode de traitement des eaux usées pour éliminer toutes ces matières.

Le tiers de l’azote qui se retrouve dans les lacs et rivières provient des rejets des usines de traitement des agglomérations. L’azote, qui est utilisé dans les fertilisants pour l’agriculture partout dans le monde, se transforme en nitrates. Les nitrates sont responsables d’une destruction de l’oxygène dans l’eau avec des conséquences sur la vie aquatique. L’azote est un bon exemple d’un produit chimique qui n’est pas traité par les usines municipales. Un autre exemple des rejets de ces usines sont les microplastiques.

Ces microplastiques se retrouvent dans les sources naturelles, dans les eaux du robinet et dans les eaux embouteillées. Ces minuscules morceaux de plastique sont microscopiques et sont souvent utilisés dans des produits pharmaceutiques et des produits cosmétiques. D’autres proviennent d’objets en plastique de plus grandes dimensions qui se fragmentent et se dégradent dans l’environnement. Suffit de penser aux produits d’emballages et aux sacs de plastique. J’ai retrouvé des articles sur les effets de ces microplastiques sur les animaux aquatiques, mais très peu sur les conséquences sur les humains. Pourtant nous pouvons en trouver dans l’eau du robinet.

Les municipalités rejettent des eaux non traitées directement dans le fleuve. Ces eaux contiennent des concentrations de produits pharmaceutiques et chimiques importantes. À titre d’exemple, statistique, Canada analyse des échantillons de ces eaux non traitées pour mesurer la consommation de cannabis et de cocaïne. Dans une autre étude, il a été démontré que de l’ibuprofène a été retrouvé dans 28 % des échantillons. Aussi surprenant que cela puisse paraître, l’Institut national de santé publique analysait les eaux usées municipales pour suivre l’évolution de la COVID-19.

La capacité d’analyse des scientifiques est impressionnante et toutes ces analyses sont effectuées sur des eaux usées avant qu’elles ne passent par une station d’épuration. Mais, il faut se rappeler qu’il y a eu, en 2022, plus de cinquante-sept mille déversements d’eaux usées directement dans le fleuve et que 81 municipalités sont sans station d’épuration. La population ne voit rien, la population ne sait rien et les autorités gouvernementales n’en parlent pas.

Une véritable crise invisible.

4 réflexions au sujet de “Crise invisible”

  1. Longueuil vient en tête.
    Ça nous fait une belle jambe de voir le nom de notre ville être la ville qui pollue le plus au Québec. ET ce n’est pas la première fois que le nom de Longueuil fait les manchettes.

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  2. Je penses que les moyens existent pour remédier a ces situations mais malheureusement les couts seraient probablement astronomiques. Toutefois il va falloir un jour prendre le taureau par les cornes et agir sinon ce sera désastreux.

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    • Oui, je crois aussi que les moyens existent mais les usines n’ont pas la capacité de traiter les volumes d’eaux usées.

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