Nous sommes en 1984, un beau dimanche matin d’été, et, à titre de maire de Saint-Lambert, je reçois à l’hôtel de ville le comité organisateur des Jeux écossais de Montréal. L’évènement se déroule au Parc de la Voie maritime ; à l’époque, recevoir les Jeux écossais était une tradition pour Saint-Lambert à un tel point que des résidents recevaient, année après année, sur leur terrain de la rue Riverside les mêmes orchestres de cornemuses et de tambours qui nous venaient de partout au Canada.
Nous sommes donc une vingtaine de personnes dans la salle de réunion de l’hôtel de ville lorsque le représentant du Gouvernement du Canada fait son entrée. À l’époque les personnes me trouvent jeune pour être maire de Saint-Lambert ; j’ai été élu en 1981 alors que j’avais 35 ans. Nous avions été avisés que le représentant d’Ottawa serait Jean Lapierre, ministre d’État à la Jeunesse et au Sport amateur dans le gouvernement Turner ; il avait 29 ans et nous étions tous curieux de le rencontrer.
La réception ne dure qu’une vingtaine de minutes et n’est que le prétexte pour réunir les dignitaires qui feront plus tard une entrée officielle sur le site des jeux. Mais, avant de partir, il y a le traditionnel toast qui est donné, selon le protocole, par la plus importante personne présente soit Jean Lapierre. Quelqu’un nous distribue un verre de scotch. Jean se tourne vers moi : « Il est onze heures du matin ; peut-on avoir de l’eau ? » Je n’ai pas le temps de répondre, le maître de cérémonie l’invite à lever son verre. Il s’exécute et, comme tout le monde, il cale son verre. À voir l’expression sur son visage, il est évident qu’il n’a pas apprécié l’expérience.
Nous nous dirigeons ensuite vers le Parc de la voie maritime dans un cortège de voitures et nous sommes invités à prendre place sur l’estrade. Quelques minutes plus tard, 300 joueurs de cornemuses et 60 joueurs de tambour se dirigent vers nous en formation et au rythme d’un air écossais traditionnel. Jean me glisse à l’oreille : « J’en ai la chair de poule. » Il a tout à fait raison, c’est à couper le souffle. Il ne devait rester avec nous que pour l’ouverture, mais il a les lieux au milieu de l’après-midi.
Nous nous sommes revus quelques années plus tard, en 1990, à une réunion du comité organisateur de Paul Martin qui briguait la chefferie du Parti libéral du Canada. Au cours des années, nous nous sommes croisés à quelques occasions et à chaque fois il me donnait l’impression que nous étions deux vieux amis qui se retrouvaient même si je suis convaincu qu’il ne se souvenait que vaguement de moi.
J’étais un accro de ses interventions radiophoniques du matin et son départ, comme pour des milliers d’auditeurs, crée un vide qui sera difficile à combler.
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